Dupont Lajoie

Film d’Yves Boisset (France, 1975). Scénario : Jean-Pierre Bastid, Michel Martens, Y. Boisset et Jean Curtelin. Image : Jacques Loiseleux. Musique : Vladimir Cosma. 100 mn. Avec Jean Carmet : Lajoie. Pierre Tornade : Colin. Michel Peyrelon : Schumacher. Jean Bouise : Boular. Jacques Chailleux : Léon. Isabelle Huppert : Brigitte. Robert Castel : Loulou. Jean-Pierre Marielle : Tartaffione. Victor Lanoux : le costaud.

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Le cinéma d’Yves Boisset est caractérisé par sa prédisposition à chercher les cotés sombres de ce qui l’entoure. Son œil critique sur la société et sa capacité à en mettre en image le plus noir est d’une efficacité redoutable. 

L’idée de départ part d’un fait divers arrivé à Sainte Maxime en 1973 ou plusieurs arabes furent tués lors d’agressions racistes. La période était violente et le passé colonial encore très présent dans toute les couches de la société.

C’est l’un des meilleurs  » pamphlets  » de Boisset, un camping rempli de vacanciers qui sont en train de jouer à la pétanque à 5 heures de l’après-midi et qui suite à un acte dramatique déclencheur, se retrouvent meurtriers à 10 heures du soir, des gens qui puent la médiocrité et qui manipulé ce font exécuteur des basses œuvres.
Une peinture crédible d’une certaine France ou la verve du cinéaste fait merveille et ou le scénariste écrit très finement pour des interprètes plus vrais que nature.

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Les auteurs ont voulus une identification partielle aux personnages par le public pour accentuer la critique de leurs actes criminels. Les acteurs sont à contre courant de leurs rôles habituels, et Jean Carmet est le plus caractérisé dans l’odieux en incarnation de la lâcheté quotidienne, du Français moyen et poisseux. La scène du viol fut un calvaire pour l’acteur qui la tourna à contre cœur en fin de film.

Jean Carmet appartenait à plusieurs bandes de copains. L’homme de Bourgueil avait une bonne fourchette et son amitié avec Jean-Pierre Coffe, Depardieu et de l’autre coté avec la bande à Audiard (Gabin, Ventura, Blier) les liait dans la confrérie des bons mangeurs.
Carmet était sûr que son rôle dans Dupont Lajoie était si horrible que la fin de sa carrière ne pouvait que suivre.

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La fin du film est marquante, ou le personnage central est tué, pourquoi cette fin ?
car les fins molles ne provoquent aucunes réflexions, le réalisateur voulait bousculer les gens dans leurs certitudes.
Boisset tourne caméra à la main pour être au plus prêt de son microcosme et pour attraper toutes les émotions que son cadrage pouvait visualiser.

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La censure exigea des coupes et le ministère de l’intérieur s’opposa à la diffusion du film à l’étranger. Un film à polémique qui essuya de nombreuses pressions. Malgré cela Le cinéma des années 70 fut un cinéma libéré de beaucoup de règles et qui voulut être le reflet de la réalité et de la société de son époque. un cinéma vérité en quelques sortes et qui se regarda dans le blanc des yeux.

Jean Carmet disait :

Avec le français moyen je peux faire passer des choses, de la fanfaronnade à l’émotion en passant par la haine. Et tout ça sans forcer. Avec le Français moyen j’ai trouvé mes charentaises.

10/10